Le sommet sur l’intelligence artificielle se déroule ce lundi et mardi à Paris. Plusieurs secteurs, y compris l’industrie musicale, font l’objet d’une réflexion quant à la place de la créativité dans un monde influencé par l’IA, notamment les services de streaming musical. Face à l’avancée de l’IA, diverses stratégies sont adoptées.
Deezer, une entreprise française, cherche à offrir une meilleure rémunération aux musiciens et à éliminer les contenus générés par l’intelligence artificielle. À l’opposé, Spotify, une plateforme suédoise, tire parti de l’IA pour enrichir ses playlists et s’ajuster aux comportements quotidiens de ses utilisateurs.
Un système axé sur les artistes
Créée en 2007, Deezer propose une bibliothèque de 100 millions de titres. Au fil du temps, il est devenu évident que le nombre de contenus explose : chaque semaine, 700 000 nouvelles musiques sont téléchargées sur la plateforme, dont 10% (environ 70 000) sont générées par IA. Deezer s’efforce donc de supprimer ces titres des recommandations et des playlists pour privilégier les artistes authentiques. « Nous soutenons l’industrie musicale et ne voulons pas que la contribution des artistes réels soit diluée par des œuvres créées 100% par IA, où aucun artiste n’a été impliqué dans le processus créatif », a déclaré Alexis Lanternier, le directeur général de Deezer, dans une interview à BFM Business.
De plus, la plateforme a changé son approche d’un modèle “market-centric”, où les revenus étaient répartis en fonction de la popularité des titres, qui désavantagent les musiciens émergents, vers un modèle “artist-centric”, où les artistes reçoivent une part plus significative des abonnements basés sur leurs écoutes.
La tendance vers une musique fonctionnelle
En revanche, Spotify, fondé en 2006 par deux entrepreneurs suédois, a une vision différente. En 2012, afin d’attirer de nouveaux abonnés, Spotify a entrepris des recherches pour comprendre pourquoi les gens se tournaient vers le streaming. Selon Liz Pelly, une journaliste américaine interviewée par Le Monde, « la majorité des utilisateurs choisissent le streaming pour créer une ambiance sonore lors d’autres activités, comme le travail ou le sport, ou simplement pour améliorer leur humeur ».
Cette musique fonctionnelle est privilégiée, car elle captive les utilisateurs. L’engagement lié à ces morceaux génère un flux de données, utilisé pour analyser leurs écoutes et pour conseiller des titres similaires via des algorithmes. D’après d’anciens employés de Spotify, il existe un programme dénommé PFC (perfect fit content) qui cible la mise en avant de musiques standardisées dans des playlists populaires.
Aujourd’hui, avec le développement de l’IA, Spotify inclut des morceaux générés par des algorithmes dans ces playlists très prisées, répondant ainsi aux attentes des utilisateurs tout en économisant sur les redevances, puisque ces créations ne concernent pas de vrais artistes. Cela entraîne une diminution des revenus pour les artistes réels sur une plateforme qui applique un système “market-centric”. De plus, il faut aussi soulever le problème des morceaux générés par IA, qui sont produits à partir de modèles sans respecter les droits d’auteur. Suno, une des plateformes proposant ce service, reçoit d’ailleurs des plaintes de la part de maisons de disque.